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L’enfer est pavé de bonnes intentions
On observe aujourd’hui dans le discours politique l’émergence de solutions « simples » concernant l’emballage, pour diminuer la quantité de déchets générés, encombrant et onéreux notamment pour les collectivités. Ces propositions, qui par ailleurs ne tiennent pas compte du fait que l’emballage n’est pas un produit de consommation comme un autre (il n’est qu’un auxiliaire du produit qu’il sert à protéger) et que la quantité de déchets qu’il génère dépend très directement de la quantité de produits consommés, se retrouvent dans de nombreux textes réglementaires ou projets en cours. Or, ces idées, parfois séduisantes au premier abord, sont parfois à la limite de la frontière entre simple et simpliste, et pour certaines, peuvent provoquer l’effet inverse de ce qu’elles espèrent résoudre.
Moins d’emballages individuels et standardiser les formats
Il y a « trop d’emballages », notamment de petite contenance, en portions individuelles par exemple. Il faudrait les supprimer au profit de formats plus gros, produisant au total moins de déchets. Or, l’impact d’un emballage est faible par rapport à celui du produit qu’il contient, et il participe à la lutte contre le gaspillage alimentaire. Les petites portions peuvent permettre l’usage nomade ou encore limiter les pertes : certains produits doivent être consommés rapidement après ouverture, un grand format multiplie alors les risques de gaspillage en cas de vitesse de consommation insuffisante… Finalement, le gain environnemental de la consommation complète du produit dépasse l’impact de la quantité d’emballage supplémentaire.
L’emballage doit aussi tenir compte des besoins du consommateur et ses fonctionnalités doivent être adaptées.
Développer des emballages compostables
Certains pensent par exemple que le compostage est une bonne solution pour régler les problèmes de déchets d’emballage : on renvoie la matière dans la nature.
Mais ce retour au sol se fera en apportant peu d’avantages agronomiques : les cartons peuvent être utilisés pour équilibrer les apports entre matières azotées et matières carbonées dans les composteurs. Ils vont aussi absorber une partie de l’humidité des déchets frais. Mais cet avantage peut être apporté de façon plus efficace par des matières brunes riches en carbone, ligneuses et plus grossières : des branches (broyées ou au moins réduites en petits tronçons), des brindilles ou des feuilles sèches, etc.
À contrario, Il est important de rappeler que les emballages papier carton sont recyclables dans une boucle quasi fermée. Ainsi les papiers et cartons récupérés seront utilisés pour fabriquer de nouveaux emballages, augmentant l’efficacité d’usage de la matière naturelle qui a été extraite : la fibre de cellulose. En les dirigeant vers des composteurs, la fibre de cellulose sera dégradée et ne pourra plus être réutilisée pour son usage initial, nécessitant de faire appel à de nouvelles ressources pour fabriquer les emballages nécessaires.
Le compostage n’est donc pas la solution la plus performante pour la gestion des ressources. En termes d’économie circulaire, il est plus judicieux d’orienter les vieux papiers et cartons vers le bac de tri.
Il faut supprimer les emballages, en vendant les produits en vrac …
La distribution de produits en vrac ne supprime pas l’emballage :
- L’emballage existe en amont de la phase de distribution puisque le lieu de vente du produit est différent de son lieu de production. Un système d’emballage est donc nécessaire pour le stocker, le protéger, l’identifier, l’acheminer…
- Il existe également en aval : qu’il soit à usage unique ou réemployé, cet emballage est nécessaire au consommateur pour ramener le produit à son domicile.
D’ailleurs, le secteur de la distribution en vrac, qui travaille depuis de nombreuses années à régler ses problématiques d’hygiène, de traçabilité ou de coûts, a trouvé des partenaires dans le secteur de l’emballage, qui ont pu apporter certaines solutions en concevant des emballages spécifiques.
Focus : Vrac : les solutions peuvent venir de l’emballage ! : lien |
… ou en réemployant
Il peut sembler assez évident qu’il suffit de réemployer les emballages pour ne pas générer de déchets et limiter les impacts environnementaux.
L’emballage réemployable ne passant pas par le statut de déchet, il est sans conteste que leur usage en diminuerait les quantités. Mais dans la réalité, faire appel à des emballages remployables va demander, comme dans le cas du recyclage, de mettre sous contrôle et de gérer un flux de produits, qui resteront une source d’encombrement et des coûts :
- Cela nécessitera la prise en charge physique de flux afin de récupérer les emballages pour les remettre en circulation et d’éviter les abandons ou pertes.
- Pour assurer la disponibilité de ces emballages, faire face aux pics de consommation et assurer la fluidité de la boucle, des espaces de stockage seront nécessaires à différentes étapes de la boucle de réemploi.
- Il y aura toujours des opérations de collecte et de tri, suivies d’opérations de contrôle, de nettoyage et de réparations, qui auront nécessairement un coût.
Coût et encombrement ne sont donc pas supprimés mais déplacés, notamment de l’espace public vers celui des entreprises.
Par ailleurs, les emballages papier carton ne sont pas à usage unique : on en réutilise la matière. La différence d’impact environnemental entre le réemploi et la réutilisation de la matière dépend de nombreux paramètres : les distances à parcourir pour remplir à nouveau ou recycler les emballages vides, la quantité d’eau ou de produits utilisés pour laver les emballages ou recycler le carton, le poids de l’emballage (qui doit nécessairement être plus robuste pour être utilisé plusieurs fois), le nombre d’emballages nécessaires pour être certain d’en disposer au moment où on en a besoin … Tout cela a un impact sur l’environnement et doit être considéré pour définir le modèle le plus pertinent en termes d’impact sur l’environnement.
Focus : Réemploi vs recyclage : deux solutions complémentaires : lien |
Certaines ACV ont montré que des emballages réemployables pouvaient être finalement moins vertueux.
Pour limiter les externalités négatives des emballages, comme la gestion des déchets, il n’y a pas de solution unique ou miracle. Le juste emballage est un concentré d’expertise, qui se définit sur mesure !